De plus en plus de personnes présentent une surcharge pondérale, en France et dans le monde. Cette situation pose un certain nombre de questions en termes de santé publique, car le surpoids et l'obésité peuvent avoir des conséquences à court et à long terme sur la santé des individus (qui ont plus de risque de développer des pathologies telles que le diabète et l'hypertension). ( Source: le figaro.fr)
Barbara Heude, chargée de recherche Inserm au Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations à Villejuif, fait le point sur la question.
Les femmes enceintes aussi sont concernées : nous avons pu observer, à l'aide des «enquêtes nationales périnatales françaises», que de plus en plus de femmes entament leur grossesse en état de surcharge pondérale, ou même obèses. C'est un constat inquiétant, dans la mesure où nous savons que l'obésité est associée à un risque élevé de complications liées à la grossesse, comme par exemple le diabète gestationnel ou l'hypertension gravidique. Des conséquences peuvent aussi porter sur la santé du fœtus qui dépend de l'environnement nutritionnel intra-utérin dans lequel celui-ci se développe. Par exemple, les enfants nés de mamans obèses ont plus de risques de naître trop gros pour leur âge gestationnel. Ces augmentations de risques ont été observées dans une étude épidémiologique française, l'étude Eden, portant sur 2.000 femmes enceintes et leurs enfants, coordonnée dans notre équipe à l'Inserm.
"Nous avons aussi pu constater dans nos études que les femmes prennent en moyenne plus de poids pendant leur grossesse au début du XXI e siècle que dans les années 1970 ou 1980. Or, une prise de poids excessive pendant la grossesse est, elle aussi, associée à un risque plus important de complications." Il faut toutefois noter que, à l'inverse, les femmes maigres ou qui prennent trop peu de poids pendant la grossesse présentent quant à elles un sur-risque d'accoucher prématurément et/ou que leur enfant présente un retard de croissance intra-utérin.
Ainsi, de plus en plus d'études épidémiologiques, dont les nôtres, mais aussi des études animales, convergent pour souligner à quel point le fœtus a besoin d'un environnement nutritionnel intra-utérin optimal pour se développer. L'état nutritionnel maternel pendant la grossesse représente donc un enjeu majeur de santé publique vis-à-vis de la santé des femmes mais aussi de celle des bébés. Mais l'enjeu pourrait être encore plus vaste et concerner la santé de plusieurs générations futures d'individus.
Doit-on prendre des vitamines pendant la grossesse ?
En effet, actuellement, un pan entier de la recherche en épidémiologie, mais aussi en physiologie animale, s'intéresse aux conséquences à très long terme de conditions nutritionnelles altérées pendant la vie fœtale. Les conditions nutritionnelles et environnementales dans lesquelles le fœtus et le petit enfant se développent pourraient influencer à très long terme la santé de l'individu.
Les mécanismes expliquant ces relations restent encore à élucider. L'une des principales pistes explorée actuellement est celle des phénomènes dits «épigénétiques». Notre génome est constitué de séquences d'ADN mais aussi d'un nombre très important de marques et de molécules qui permettent la régulation de l'expression des gènes. Ces marques «épigénétiques» peuvent être modulées par l'environnement, et inscrire à plus ou moins long terme dans nos cellules de nouveaux «programmes» de fonctionnement, sans que l'ADN lui-même n'ait été modifié.
En épidémiologie, nous n'avons pas encore les moyens techniques d'étudier ces phénomènes épigénétiques dans de grandes populations, mais nous pouvons suivre pendant plusieurs années le développement et la santé d'enfants après avoir mesuré leurs expositions environnementales et nutritionnelles précoces. L'étude Eden a déjà mis en évidence le rôle de l'évolution du poids des mères avant la grossesse et en tout début de grossesse vis-à-vis du déroulement de la grossesse et de la croissance fœtale.
Ces résultats suggèrent qu'une prise en charge nutritionnelle de la mère en tout début de grossesse, voire avant la conception, pourrait contribuer à prévenir les cas de croissance fœtale extrême ; et un changement de régime alimentaire pendant la grossesse seulement ne suffirait pas à renverser la tendance. Il faut à présent connaître les conséquences à plus long terme de ces évolutions pondérales autour de la conception et pendant la grossesse, ce que nous allons faire à l'Inserm dans la cohorte Eden, où les enfants ont maintenant tous 5 ans, mais aussi grâce aux données de la cohorte Elfe qui a débuté cette année et qui suivra presque 20 000 enfants pendant vingt ans.
http://eden.vjf.inserm.fr www.elfe-france.fr
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